Le Venezuela divise l'Amérique latine
Deux mois après l'élection présidentielle, la situation politique au Venezuela semble dans l'impasse. L'espoir d'un changement s'est transformé en illusion, la mobilisation organisée par Maria Corina Machado se heurtant à une répression sans précédent de la part du régime de Maduro.
L'opposition dirigée par Edmundo Gonzalez et Maria Corina Machado a revendiqué sa victoire, avec plus de 80% des voix. Cependant Nicolas Maduro a conservé le pouvoir, soutenu par les différentes institutions qu'il contrôle : le Conseil national électoral, l'armée et le ministère de la Justice. Depuis les élections, les dissidents politiques sont traqués par la police et l'armée. Maria Corina Machado et Edmundo Gonzalez ont été accusés de complot et de terrorisme et contraints de se cacher.
La stratégie de Nicolas Maduro semble avoir porté ses fruits, puisque Edmundo Gonzalez a récemment fui le pays. Le candidat de l'opposition a expliqué avoir été contraint de signer une lettre reconnaissant sa défaite à l'élection présidentielle avant de monter dans un avion pour l'Espagne.
L'exil d'Edmundo González est un coup dur pour l'opposition, même si Maria Corina Machado n'a pas encore abandonné ses espoirs de vaincre Maduro. Dans une récente interview, elle a expliqué que le régime de Maduro était de plus en plus isolé au niveau national et international. Elle a demandé aux dirigeants internationaux de continuer à faire pression sur le régime de Nicolas Maduro.
La pression internationale semble être le seul espoir qui reste à l’opposition. Cependant, les réactions de certaines personnalités régionales comme Lula au Brésil ou Gustavo Petro en Colombie n’ont pas encore eu d’impact significatif. En réalité, la situation au Venezuela continue de diviser les dirigeants latino-américains. Lors de l’Assemblée générale des Nations Unies 2024 cette semaine, certains chefs d’État se sont empressés de faire pression sur Nicolas Maduro, tandis que d’autres n’ont même pas évoqué le Venezuela.
Le président américain Joe Biden a apporté son soutien à l'opposition vénézuélienne, affirmant que les Vénézuéliens avaient voté pour un changement « qui ne peut être nié ». Le Paraguayen Sebastian Peña et l'Argentin Javier Milei ont critiqué le régime de Maduro et le manque de transparence des résultats des élections. De même que le président chilien Gabriel Boric, qui a mis en garde la communauté internationale contre l'impact direct de cette nouvelle crise sur la région, affirmant que le Chili ne pouvait pas accueillir davantage de migrants fuyant le Venezuela.
Cependant, Lula et Gustavo Petro n'ont pas mentionné le Venezuela dans leurs discours respectifs. Depuis deux mois, le Brésil et la Colombie ne reconnaissent pas la victoire de Maduro mais lui accordent le bénéfice du doute, en demandant à l'organisme électoral vénézuélien de publier les preuves de sa victoire. Les deux pays ont engagé des négociations avec Caracas pour trouver une solution à cette crise politique mais rien n'a été obtenu jusqu'à présent. Lula a même évoqué la possibilité d' organiser de nouvelles élections avec des observateurs internationaux.
Dans une interview à CNN, Gustavo Petro a assuré que ni la Colombie ni le Brésil ne reconnaîtraient la victoire de Maduro sans la présentation du décompte des voix. Le président colombien a également indiqué que de nouvelles discussions devraient avoir lieu prochainement entre le Brésil, la Colombie, le Mexique et le Venezuela. Il est toutefois difficile d'envisager un résultat significatif de ces négociations, surtout à l'approche des élections américaines du 5 novembre.
Les résultats des élections américaines pourraient en effet être déterminants pour l'avenir de la démocratie vénézuélienne, même si ni Kamala Harris ni Donald Trump n'ont clairement indiqué comment ils géreraient la situation s'ils étaient élus. En attendant, l'administration américaine en place envisage, une fois de plus, d'imposer des sanctions au Venezuela et notamment à l'industrie pétrolière et gazière. Washington pourrait révoquer la licence de Chevron au Venezuela, ce qui constituerait une perte énorme pour le régime de Maduro.
Malheureusement, les hésitations de pays clés comme le Brésil, la Colombie et les États-Unis ont donné un temps précieux à Nicolas Maduro pour renforcer sa position. Et la période électorale américaine pourrait encore retarder toute avancée diplomatique significative jusqu’en janvier 2025. Dans ce contexte, l’opposition, aujourd’hui disloquée, doit repenser sa stratégie et maintenir la mobilisation. Maria Corina Machado entend rester active, notamment sur les réseaux sociaux. Elle a appelé hier ses partisans à se rassembler ce samedi au Venezuela et partout dans le monde, deux mois exactement après l’élection.