Mexique : les défis de Claudia Sheinbaum
La présidente élue du Mexique, Claudia Sheinbaum, a officiellement prêté serment le 1er octobre. Elle devient ainsi la première femme présidente du Mexique, une étape historique pour le pays.
Alors qu'elle passe de maire de Mexico à présidente du pays, Claudia Sheinbaum entame sa présidence avec un ensemble complexe de défis, allant des réformes politiques à l'incertitude économique en passant par la violence persistante liée aux cartels de la drogue. Elle devra faire face à ces problèmes multidimensionnels tout en conservant la dynamique de son prédécesseur, Andrés Manuel López Obrador (AMLO), qui continue d'exercer une influence déterminante sur sa politique.
Défis politiques
Le premier grand test politique de Sheinbaum sera de faire face aux conséquences d'une réforme judiciaire controversée. AMLO a fait passer une réforme qui prévoit l'élection des juges au suffrage universel , une mesure que Sheinbaum devra défendre ou adapter. Les critiques affirment que ce changement pourrait porter atteinte à l'indépendance des juges et accroître l'influence du crime organisé dans le système judiciaire. Des partenaires économiques clés comme les États-Unis et le Canada ont exprimé leurs inquiétudes quant à l'impact de la réforme sur la stabilité démocratique du Mexique et sur l'environnement des affaires. En septembre, le Wall Street Journal a révélé que des entreprises américaines avaient détenu 35 milliards de dollars d'investissements en raison des inquiétudes suscitées par cette réforme.
Le paysage politique est encore plus compliqué par l’examen minutieux de sa relation avec AMLO . Sheinbaum est une alliée fidèle de l’ancien président, mais elle devra établir son leadership indépendant tout en gérant les attentes du parti Morena au pouvoir. Sa réussite à équilibrer la continuité avec les réformes nécessaires sera essentielle à sa survie politique.
Défis économiques
L'économie mexicaine, bien que relativement solide sous AMLO, est confrontée à une incertitude croissante . Le résultat de l'élection présidentielle américaine de novembre aura un impact significatif sur la politique économique de Sheinbaum. Si l'ancien président Donald Trump, l'un des principaux candidats républicains, remporte le scrutin, sa politique de « l'Amérique d'abord » pourrait remettre en cause la dépendance du Mexique aux exportations vers les États-Unis, en particulier dans le secteur automobile. Trump a déjà menacé d'imposer des droits de douane plus élevés sur les voitures et les biens produits au Mexique , une mesure qui pourrait déstabiliser la base manufacturière du pays.
En interne, Sheinbaum hérite d'une économie avec des taux de croissance solides et une baisse de la pauvreté. Cependant, la confiance des investisseurs a été ébranlée, le peso mexicain ayant perdu 13 % de sa valeur depuis son élection . Les inquiétudes concernant les réformes judiciaires et l'instabilité potentielle sous sa direction ont conduit certains investisseurs étrangers à geler des projets, soulignant encore davantage la nécessité d'une plus grande clarté économique.
Malgré ces défis, Sheinbaum reste optimiste. Son administration entend attirer les investissements directs étrangers (IDE) et prévoit une augmentation annuelle de 3 à 4 milliards de dollars, ce qui représenterait un total d’environ 24 milliards de dollars d’ici la fin de son mandat de six ans. Cette perspective optimiste dépend toutefois de sa capacité à gérer à la fois les réformes intérieures et les pressions extérieures.
Insécurité et lutte contre les cartels
Le problème le plus urgent pour l'administration Sheinbaum est peut-être la violence généralisée liée aux cartels de la drogue. Le Mexique continue de connaître des niveaux élevés de criminalité violente, l'activité des cartels étant au cœur d'une grande partie de ces troubles. L'approche d'AMLO consistant à « des câlins, pas des balles » a été critiquée pour son inefficacité à endiguer la violence des cartels.
Récemment, une vague d’homicides a secoué l’État de Sinaloa , avec plus de 80 morts depuis le début du mois de septembre. Ces meurtres sont liés à la guerre civile entre factions rivales du tristement célèbre cartel de Sinaloa, mettant en évidence la violence profondément enracinée qui continue de gangrener le pays. L’insécurité est la principale préoccupation des citoyens mexicains, et Sheinbaum subit une pression énorme pour obtenir des résultats là où ses prédécesseurs ont échoué.
Depuis que Felipe Calderón a déclaré la guerre aux cartels en 2006, aucun président mexicain n’a réussi à endiguer le pouvoir et la violence de ces organisations criminelles. Sheinbaum devrait désormais briser ce cycle, mais les cartels étant ancrés dans les systèmes locaux et nationaux, sa voie vers le succès est incertaine. Les enjeux sont élevés et il est urgent de mettre en place une stratégie efficace.