Colombie : revers politique pour Gustavo Petro
La défaite du camp présidentiel lors des élections locales du 29 octobre fragilise un peu plus le mandat de Gustavo Petro.
Un an après l’élection de Gustavo Petro, ce scrutin, qui pour certains servait de référendum vis-à-vis de la politique du chef de l’Etat, a été marqué par un faible taux de participation (55%) et une défaite significative pour le premier président de gauche de l’histoire du pays. Si aucune force d’opposition ne semble vraiment se démarquer, les courants de droite dans leur ensemble auront réussi à s’imposer dans les villes les plus importantes. À Bogota, le candidat centriste Carlos Fernando Galan, fils de Luis Carlos Galan assassiné en 1989, a remporté la mairie avec 49% des voix. Les mairies de Medellin, Cali et Baranquilla ont également été remportées par des candidats de droite ou centre-droite.
Après la publication des résultats, le président Gustavo Petro a souligné la bonne tenue de ces élections en ajoutant qu’il respectait le vote des Colombiens et qu’il s’efforcerait de prendre en considération certaines propositions des élus locaux dans son agenda politique ; laissant penser qu’un remaniement du gouvernement pourrait avoir lieu. Depuis son élection le président Petro a déjà procédé à 11 remaniements ministériels.
Après avoir fait passé une réforme fiscale d’envergure il y a un an, les ambitions de Gustavo Petro pour la Colombie ont du mal à convaincre. Le président souhaite sortir le pays de l’exploitation pétrolière, en arrêtant les exportations et l’ouverture de nouveaux puits. Une décision qui divise en Colombie, alors que le pétrole représente 40% des exportations du pays et l’une des principales sources de revenus pour l’Etat colombien. Gustavo Petro a également amorcé plusieurs réformes significatives annoncées lors de sa campagne visant à revoir en profondeur le système de santé, les retraites et le code du travail. Le gouvernement de Gustavo Petro est aussi critiqué pour sa politique de “paix totale” qu’il a souhaité mettre en place il y a un an et qui vise à négocier des accords de paix avec les groupes armés en Colombie. Une approche qui ne fait pas l’unanimité en Colombie et dont les résultats sont pour l’instant mitigés.
Cet ensemble de réformes représente des changements structurels pour la Colombie, longtemps gouvernée par une élite conservatrice de droite. Toutefois, ce virage amorcé par le président semble avoir fragilisé sa coalition politique Pacto Historico, dont les divisions se sont matérialisées au moment de dresser les listes électorales pour ces élections locales. L’opposition de droite quant à elle s’inquiète de la hausse des dépenses, et de l’impact de ces réformes sur la croissance économique du pays. Selon les dernières estimations du FMI, la Colombie devrait connaître une croissance de 1,4% en 2023 et 2% en 2024. Le pays connaît une forte hausse des prix depuis deux ans. L’inflation devrait s’établir à 11,4% pour l’année 2023 avant de baisser autour de 5% en 2024.
Au-delà des divisions politiques autour de son programme, le mandat de Gustavo Petro est aussi bousculé par plusieurs scandales visant le financement de sa campagne et les relations de son entourage avec le crime organisé. Son fils Nicolas a été arrêté en juillet dernier pour blanchiment d’argent en lien avec le financement de la campagne présidentielle. Une accusation que Nicolas Petro à avoué à demi-mot lors d’une audience judiciaire le 3 août dernier. D’autres proches de Gustavo Petro, tels que Armando Benedetti, sont également accusés d’avoir participer à un financement illégal de la campagne du président. Ces affaires ont un poids important dans l’opinion publique et parmi la classe politique. Elles constituent un frein à la bonne conduite des réformes souhaitées par Gustavo Petro.
La défaite de la coalition présidentielle aux élections locales s’ajoute donc aux divisions politiques et aux scandales autour du financement de la campagne du Président, qui fait aujourd’hui l’objet d’un mécontentement populaire significatif. Dans une enquête de début octobre, 60% des Colombiens interrogés désapprouvaient la politique de Gustavo Petro, contre 20% au début de son mandat.