Equateur : le président Lasso dissout le Parlement

Au lendemain de l'ouverture d'une procédure de destitution à son encontre, Guillermo Lasso a prononcé la dissolution du Parlement, provoquant l'organisation de nouvelles élections sous 90 jours.

Le président de l’Equateur Guillermo Lasso a dissout l’Assemblée le 17 mai 2023. Photo : Bolivar Parra/Ecuador Presidency/Reuters

Le président de l'Équateur, Guillermo Lasso, a acté la dissolution du Parlement le 17 mai dernier. Une décision prise au lendemain de l’ouverture d’une procédure de destitution à son encontre. Le président a ainsi évoqué la clause constitutionnelle appelée “muerte cruzada”.

Cette clause prévoit donc la dissolution du Parlement et l’organisation d’élections présidentielles et législatives sous 90 jours. Pendant ce laps de temps, le président pourra gouverner uniquement par décrets portant sur des thématiques d’urgence économique.

Depuis plusieurs mois, des accusations de corruption à l’encontre de son entourage avaient fragilisé le président équatorien. De plus, l’échec du référendum en février avait constitué une lourde défaite politique. Une enquête publique avait été initiée par l’opposition au Parlement, débouchant sur l’ouverture d’une procédure de destitution le 16 mai.

Le président équatorien avait déjà échappé à une destitution en juillet 2022, alors que le pays traversait une crise sociale importante, notamment à cause de l’inflation. Guillermo Lasso avait réussi à ouvrir un dialogue avec les communautés indigènes et promettait des changements structurels significatifs au travers d’un référendum. La multiplication des affaires de corruption visant son entourage proche a néanmoins fortement affecté son crédit politique.

Guillermo Lasso a justifié la dissolution du Parlement en déclarant qu’il s’agissait d’une “décision démocratique, pas seulement parce qu’elle est constitutionnelle, mais aussi parce qu’elle remet le pouvoir entre les mains des Equatoriens”. Il a également affirmé que cette décision était nécessaire pour sortir de la crise politique que traverse le pays.

Ces derniers mois, l'opposition de gauche, menée à distance par l'ancien président Rafael Correa, a été très active et critique envers le gouvernement de Lasso. Révolution Citoyenne, le parti de Rafael Correa a remporté une victoire politique majeure lors des élections locales de février, reprenant le pouvoir dans les municipalités de Quito et de Guayaquil, les deux plus grandes villes du pays.

Dès ce vendredi, Rafael Correa s’est positionné en vue des élections anticipées à venir, affirmant que son parti était prêt à reconstruire le pays et à s’attaquer aux problèmes de sécurité publique, ajoutant qu’il espérait obtenir au moins 50 sièges sur 137 au sein du Parlement. Exilé en Belgique après sa condamnation en 2020 à huit ans de prison pour des faits de corruption, l’ancien président reste un personnage influent dans le paysage politique équatorien.

Au-delà des tensions politiques, l'Équateur fait face à des défis économiques et sociaux importants. Le pays est confronté à une crise économique persistante, marquée par une dette publique élevée et des inégalités croissantes. De plus, l'Équateur connaît depuis un an une vague de violences sans précédents, liée au narcotrafic. Plusieurs séries de massacres ont suscité l'indignation du public et accentuent le sentiment d'insécurité.

La dissolution du Congrès soulève également des questions sur la stabilité institutionnelle du pays et la capacité de l’exécutif à gouverner efficacement. Même si la situation est différente, de nombreux observateurs redoutent une dégradation du climat politique qui pourrait mener à une impasse similaire à celle que connaît le Pérou. Avec un taux d’approbation inférieur à 15%, il est difficile d’imaginer que Guillermo Lasso puisse prétendre à sa réélection lors du scrutin anticipé qui pourrait être organisé autour du 20 août.