Rencontre Lula-Biden à Washington
Lors d'une visite diplomatique à Washington, Lula et Joe Biden ont réaffirmé leur attachement aux valeurs démocratiques et à la lutte contre le réchauffement climatique.
Le président brésilien a rencontré son homologue américain à Washington ce vendredi 10 février. Joe Biden avait invité Lula à Washington au lendemain de l’invasion de la place des Trois Pouvoirs à Brasilia par des militants bolsonaristes le 8 janvier dernier. La rencontre entre les deux dirigeants visait à renforcer la légitimité des deux présidents. Joe Biden et Lula ont d’ailleurs reconnu les similitudes entre leurs mandats respectifs : ils sont chacun arrivés au pouvoir dans un contexte de forte polarisation politique ont tous les deux vaincu un président sortant qui a refusé de reconnaître les résultats des élections.
Les deux présidents ont réaffirmé l’importance du respect de la démocratie dans leur deux pays. Lula a également déploré l’isolation du Brésil sur la scène internationale durant le mandat de son prédecesseur Jair Bolsonaro.
Au-delà de la portée symbolique de cette rencontre, les deux présidents ont évoqué plusieurs sujets sur lesquels les deux pays souhaitent renforcer leur coopération, en premier lieu la lutte contre le réchauffement climatique. Comme espéré par Lula, l’administration américaine s’est ainsi engagée à participer au Fonds pour l’Amazonie, une initiative créée en 2008, réactivée par Lula depuis son retour au pouvoir, visant à recolleter des fonds pour lutter contre la déforestation. La participation des Etats-Unis à ce Fonds devra être soumise à un vote du Congrès mais elle est saluée comme une étape importante dans la protection de l’Amazonie par les environnementalistes. Elle constitue également une victoire politique significative pour Lula dans son combat contre la déforestation, alors que celle-ci est déjà en baisse en janvier 2023.
Le sommet entre les deux chefs d’Etat était aussi l’occasion pour Joe Biden de demander à Lula un engagement plus concret en faveur de l’Ukraine dans la guerre contre la Russie. Une demande aussi formulée par Olaf Scholz lors de sa visite au Brésil il y a deux semaines (voir l’édition de la semaine dernière). Le chancelier allemand avait demandé au Brésil de s’engager à fournir des munitions à l’Ukraine. Une initiative refusée par le président brésilien qui veut que son pays conserve une certaine neutralité dans ce conflit.
Depuis le début du conflit il y a un, Joe Biden a essayé de rallier les pays du Sud à la cause ukrainienne. Et un engagement du Brésil dans ce sens serait un pas important pour les autres pays en développement. Mais Lula, comme beaucoup de dirigeants de ces pays, estime que les torts sont partagés dans la guerre entre la Russie et l’Ukraine. Plutôt que de prendre position pour l’Ukraine, le président brésilien souhaiterait mettre en place un “club pour la paix”, avec des pays du Sud, permettant de négocier une paix entre l’Ukraine et la Russie. Mais selon Joe Biden, de telles négociations sont pour l’instant exclues au vu des crimes de guerre commis par la Russie et les bombardements incessants des villes ukrainiennes.
La neutralité du Brésil dans ce conflit est mal vécue par Washington, qui aimerait que le plus grand pays d’Amérique du sud condamne plus fermement la Russie et apporte un soutien concret à l’Ukraine. De plus, la proximité du Brésil avec la Chine, au sein des BRICS et au travers de leurs relations commerciales, est aussi source de tensions entre Lula et Joe Biden. Le président brésilien prévoit une visite diplomatique à Pékin au mois de mars, alors que les Etats-Unis et la Chine sont en pleine crise diplomatique, suite à la destruction d’un ballon espion chinois par l’armée américaine.
Les deux présidents n’ont pas abordé publiquement la situation de Jair Bolsonaro. L’ancien président du Brésil est parti en Floride la veille de l’investiture de Lula et a demandé un visa de six mois pour rester aux Etats-Unis. Néanmoins, dans une interview parue ce mardi, il déclare vouloir revenir au Brésil en mars pour prendre la tête de l’opposition au gouvernement, laissant croire que sa demande de visa n’a pas été acceptée par les autorités américaines. S’il venait à rentrer au Brésil, Jair Bolsonaro pourrait faire face à plusieurs accusations, notamment celle de crimes contre l’humanité pour sa gestion plus que laxiste de la crise sanitaire alors qu’il était président.