Crise migratoire USA-Mexique

Un nouveau pic migratoire met à l'épreuve les autorités des deux pays le long de leur frontière commune.

Des migrants font la queue à la frontière entre Ciudad Juarez et El Paso, Texas pour demander l'asile aux USA. Photo : Jose Luis Gonzalez/Reuters

Ces derniers jours une forte augmentation des traversées illégales de la frontière a entraîné la fermeture temporaire d’un point de passage et perturbé le fret mexicain. La situation a poussé les responsables mexicains et américains à se rencontrer à Ciudad Juárez, au Mexique. Les deux pays se sont rapidement entendus sur un plan d’action pour faire face à cette nouvelle vague migratoire.

Dans le cadre de l'accord, le Mexique s'est engagé à reconduire dans leur pays certains migrants qui avaient atteint les villes du nord qui bordent El Paso, San Diego et Eagle Pass au Texas, trois villes débordées par les flux migratoires. L'Institut national de la migration du Mexique doit également mettre en œuvre plusieurs actions visant à dissuader les migrants de monter sur les trains de fret pour atteindre la frontière.

Le nombre de traversées de migrants le long de la frontière entre les États-Unis et le Mexique augmente de façon continue ces derniers mois. Ces derniers jours, la police américaine a arrêté jusqu’à 8.600 migrants illégaux en 24 heures, par rapport à une moyenne de 3.500 arrestations par jour en mai dernier, juste après la suppression du “Title 42”.

Le “Title 42” est une mesure prise par Donald Trump lors de la crise sanitaire du covid-19, qui visait à restreindre fortement les demandes d’asile. Cette mesure avait été étendue par l’administration Biden avant d’être définitivement supprimée en mai 2023. L’existence de cette mesure avait permis de limiter les flux migratoires mais ceux-ci n’ont été que repoussés dans le temps et se matérialisent aujourd’hui. Pour anticiper une dégradation de la situation suite à la suppression du “Title 42”, Washington avait obtenu l’ouverture de plusieurs centres migratoires au Guatemala et en Colombie, destinés à filtrer en amont les flux migratoires.

Une stratégie proactive qui doit encore faire ses preuves car le nombre de migrants essayant de traverser la frontière continue d’augmenter. En août les autorités américaines ont arrêté environ 180.000 migrants le long de la frontière, soit une augmentation de 38% par rapport au mois précédent.

Cette hausse est attribuée à divers facteurs, notamment l’insécurité au Mexique, la désinformation sur les réseaux sociaux (qui laissent souvent penser qu’il est facile de passer la frontière), mais aussi la faillite politique et économique de pays comme le Venezuela, le Nicaragua et le Honduras. La grande majorité des migrants fuient des situations de forte insécurité ou pauvreté et transitent à travers le Mexique pour rejoindre les Etats-Unis. Le Mexique reçoit environ 6.000 migrants chaque jour à sa frontière sud, dont la moitié provient d’Amérique centrale.

La situation en est rendue “à un point de rupture” selon Oscar Leeser, maire d’El Paso, ville qui reçoit plus de 2 000 migrants supplémentaires chaque jour et où des refuges temporaires sont ouverts pour faire face à l'afflux sans précédent de migrants. Ce lundi, près de 8.000 camions, représentant 1 milliard de dollars de marchandises, étaient encore bloqués à Ciudad Juarez, ville frontalière d’El Paso.

Si l’Etat du Texas est en première ligne face à cette crise migratoire, les migrants sont souvent envoyés en bus dans des grandes villes comme New-York, Chicago, Los Angeles ou encore Philadelphie. À New York, le maire Eric Adams (Démocrate) s’inquiète d’une situation hors de contrôle et d’une crise qui pourrait “détruire New York City” et demande un soutien plus important de la part du gouvernement fédéral.

Alors que Républicains et Démocrates se renvoient la responsabilité de l’accueil des migrants, la pression est mise sur le gouvernement central. Joe Biden a récemment octroyé des titres de séjour à 472.000 Vénézuéliens vivant en situation illégale aux Etats-Unis. Une façon pour le président de répondre aux critiques émanant de son propre parti. Toutefois, Joe Biden souhaite également durcir les processus existants en élargissant à plus de cas les extraditions et en renforçant la présence militaire à la frontière. Le département américain de la Défense a ainsi envoyer 800 personnels supplémentaires à la frontière, qui compte déjà 2.500 membres de la Garde nationale.

La situation pourrait s’aggraver dans les prochains mois et forcer Washington à y consacrer plus de moyens humains et financiers. Véritable casse-tête pour l’administration Biden, la crise migratoire pourrait progressivement devenir le principal sujet politique aux Etats-Unis, à un an des élections présidentielles.

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