Bolivie : tensions sur l'économie
La Bolivie fait face à une crise monétaire depuis plusieurs semaines. Les réserves de dollars US de la Banque centrale ont fondu ces derniers mois et les files aux bureaux de change s'allongent.
En février, la Banque centrale bolivienne avait laissé entendre que ses réserves en dollars US étaient plus basses que prévues : 372 millions de dollars, alors qu’il en faudrait 400 millions par mois pour soutenir l’économie nationale selon l’économiste Antonio Saravia. Une annonce qui a poussé les Boliviens à acheter des dollars, inquiets d’une possible dévaluation ou de l’application de restrictions sur l’échange de devises. Cette réaction a provoqué une hausse du taux de change sur le marché noir (environ 10 bolivianos pour 1 USD).
La situation a poussé la Banque centrale à vendre directement des dollars US aux Boliviens depuis le 6 mars, au taux fixe de 6,86 bolivianos pour 1 USD. L’institution située dans la capitale de La Paz souhaitait ainsi rassurer et atténuer la hausse du taux de change sur le marché noir. Depuis, de longues files d’attente se sont formées devant la Banque centrale. Face à cette crise, l’agence Fitch Ratings a abaissé la note de crédit du pays à B avec une perspective négative. L’agence souligne la situation inquiétante des réserves de change et les risques sur l’économie à court terme.
La Bolivie a vu ses réserves de change fondre ces dernières années, passant de 15 milliards de dollars US en 2014 à 3,5 milliards en 2023 selon Fitch. Cette baisse s’explique par la dégradation de la position commerciale de la Bolivie ces dix dernières années. La Bolivie a longtemps été exportateur net d’hydrocarbures depuis les années 2010 mais les exportations ont baissé de façon continue et le pays pourrait devenir importateur net d’ici 2030. Une situation d’autant plus compliquée depuis la baisse des prix du gaz naturel et du pétrole l’été dernier.
La Bolivie a connu une forte croissance au cours de la dernière décennie, tirée en partie par ses vastes réserves de ressources naturelles, dont le lithium. Cependant, certains analystes craignent maintenant que le miracle économique de la Bolivie ne touche à sa fin, alors que le pays lutte contre l'inflation, la pénurie de devises étrangères et la baisse des prix des matières premières.
Face à ces défis, la Bolivie dispose encore d'importants leviers économiques. Le pays possède de vastes réserves de ressources naturelles, dont le lithium, qui pourraient contribuer à stimuler la croissance à l'avenir. Le président Luis Arce a récemment annoncé son intention de développer 42 nouvelles usines de lithium, ce qui pourrait générer des emplois et stimuler la croissance économique du pays. Cependant, la capacité du gouvernement à gérer efficacement ces ressources suscite des inquiétudes.
De plus, la Bolivie est aussi en proie à des tensions politiques qui alimentent un climat peu rassurant dans le pays. Le gouvernement du président Arce a du mal à maintenir l'unité au sein de son parti au pouvoir. Sa gestion économique est régulièrement ciblée par l’opposition mais aussi par des figures importantes de son propre camp, notamment l'ancien président Evo Morales, qui reste populaire en Bolivie. Luis Arce a récemment décidé d’accélérer la nationalisation des fonds de pension privés, une mesure controversée mais qui devrait permette à l’Etat bolivien de récupérer des financements plus rapidement.